Ce rapport est le deuxième du carnet de repérages établi par Lila Tobosco, script du studio de cinéma Espèces d’Espaces, dans le cadre du prochain tournage de Pippo Taleggio à La Haye-Fouassière.
Rapport de Lila Tobosco, script.
Semaine du 20 au 25 janvier 2025, La Haye Fouassière.
Nous voilà de retour à La Haye-Fouassière avec Pippo Taleggio et Ruben pour poursuivre nos investigations sur ce territoire et son histoire.. Nous embarquons à bord d’un camping-car transformé en studio-mobile, prêté par la belle-mère de Ruben. Pippo l’a surnommé « La Lumaca », la limace, ou l’escargot en italien, sans savoir s’il faut attribuer ce surnom à sa lenteur ou au fait qu’on trimballe ainsi notre maison (ou plutôt notre studio) sur notre dos.
Lundi
Notre enquête nous mène définitivement au cœur du monde des vignerons. On nous ouvre les portes des caves, chez Landron, Bidgi ou chez Vinet. Les cuves gigantesques nous apparaissent comme des fusées prêtes à décoller, mais le vin se cache aussi sous la terre, dans des cuves enterrées carrelées de carreaux de verre. De la cuve à la bouteille, il n’y a que quelques machines minutieusement réglées, qui, bouchons après étiquettes, finissent de préparer des hectolitres de muscadet pour l’export, qui se vendront en Amérique, en Chine ou au Japon.
Mardi
En ce frisquet matin de janvier, notre carrosse s’avance au pas dans les vignes. L’hiver est là, le gel a recouvert les ceps. Dans les champs, les ouvriers viticoles sont occupés à la taille. Le bruit des sécateurs électriques accompagne leurs gestes expérimentés, avec pour bande-son leur petite radio portative.
On prend de la hauteur, avec l’envie de voir les vignes par-dessus les murs et les domaines. Le drone nous sert d’yeux, survolant les coteaux. Vus depuis l’espace, en vision satellite, tous les arpents de terre se ressemblent. Difficile de deviner où s’arrêtent les parcelles et à qui elles appartiennent. Sans leur faire offense, rien ne ressemble plus à un pied de muscadet qu’un autre pied de muscadet. Une fraction d’inattention et notre drone finit par se crasher dans la Sèvre Nantaise : cette erreur de pilotage nous aura coûté quelques jolis plans de vignes.
Mercredi
Nous avalons un café poudre dans la salle paroissiale de la commune en compagnie de monsieur le curé. Une discussion en appelant une autre, nous finissons par l’interroger sur la meilleure manière de devenir saint, et s’il est recommandé de croire aux miracles… Sur un malentendu, ça peut marcher. Mais malgré nos efforts, il est probable que Saint-Pippo reste sur le banc de touche…
Jeudi
Le muscadet, lui, ne doit rien à l’intervention du Saint-Esprit. De retour dans les caves, nous posons notre fond vert ça et là, entre deux cuves, chez un voisin, près d’un tracteur. Les interviews se succèdent, en quête de témoins du temps qui passe. Chaque commune a ses figures locales, ses mémoires de village, ses grandes gueules et ses timides, il s’agit juste de les trouver.
Vendredi
« Le café est le parlement du peuple » disait Balzac. C’est aussi le lieu où se racontent les histoires, les commérages, et les bagarres, toute matière utile à la fiction ! Ici, c’est le Seventy, ses tables en Formica et son patron, qui inspirent les décors de futures scènes du film. Après quelques heures d’accessoirisation et des costumes d’époque, l’équipe se lance dans les premiers tournages.
