Chambre à air

Récit d’un atelier d’enregistrement sonore

Récit d’un atelier d’enregistrement sonore entre des élèves du collège Saint-Gabriel de Haute-Goulaine et des résidents du centre hospitalier Delaroche à Clisson, dans le cadre du projet Un p’tit vélo dans la tête de Kat Lucas (FotoSonor).

Dans l’élan du projet Un p’tit vélo dans la tête mené par Kat Lucas (FotoSonor), résidents et collégiens ont tracé un pont entre hier et aujourd’hui avec rien de plus qu’un micro, une bicyclette et des souvenirs.

La salle d’animation du centre hospitalier Delaroche de Clisson est vide de monde mais pleine de décorations. C’est bientôt Noël et les vitres se sont parées de dessins blancs de flocons, d’étoiles, de sapins. Il y en a d’ailleurs un aussi, fièrement posé sur une table sous le regard encadré du Père Noël. Et puis tout autour, des images qui témoignent d’ateliers, de repas, d’échanges, comme cette photo épinglée sur une ribambelle accrochée à un pilier. On y voit Gérard prenant la pose avec Mathilde, danseuse de la compagnie Yvann Alexandre, souvenir d’une semaine de résidence, il y a déjà un an.

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Gérard est toujours ici, et toujours aussi partant. Il est un des premiers résidents à franchir la porte de la salle d’animation pour cette matinée avec les élèves du collège Saint-Gabriel de Haute-Goulaine. Sur une table, Kat Lucas qui porte le projet Un p’tit vélo dans la tête, a déjà posé pochettes zippées, enregistreurs et casques. Car ce matin les jeunes viennent interroger les résidents autour de leurs souvenirs de vélo.

La vingtaine d’élèves de cinquième entre, presque en silence, et s’installe en cercle pour commencer par un goûter et un échange. Kat présente le projet et ce sont les résidents qui sont les plus dissipés, notamment Claude et Gérard qui discutent, complices, obligeant à un recadrage joyeux. Un jus, un gâteau et déjà les discussions des résidents évoquent les bicyclettes, les souvenirs partagés de modèles de vélos : Gitane, Motobécane, Poulidor.

Alors les groupes se font. Trois ou quatre élèves, un résident et direction les chambres pour un temps d’échange intime. Sauf pour Gérard qui accueille dans le patio ses intervieweurs : Iness, Gauthier et Louane. C’est elle qui mène l’entretien. Elle suit le script puis relance, rit, tente, incite Gérard à prolonger le fil de ses pensées.

Qu’est-ce que vous ressentiez quand vous vous baladiez à vélo ?
Est-que vous avez un souvenir douloureux à nous raconter ?

Quelques minutes plus tard, je capte les conversations d’Annick. Assise dans son fauteuil près d’une grande fenêtre ornée de guirlandes duveteuses ou lumineuses, la résidente, pimpante et solaire parle de liberté. “C’était l’herbe, c’était les arbres, c’était les châtaigniers” résume-t-elle, avant de confesser quelques bêtises d’enfance, comme lorsqu’elle roulait avec les pieds sur le guidon.

Son voisin, Claude, met toujours le pied sur les pédales. Un pneu traîne même négligemment dans un coin. Le vélo a toujours été là dans sa vie : de son premier, dès l’âge de trois ans, qu’il appelait Titi selon sa mère, jusqu’à aujourd’hui et sa hâte du retour des beaux jours, pour le ressortir et aller se promener.

La demi-heure d’échange est passée vite et il est temps de retourner dans la salle d’activité pour conclure ce moment. “Je suis allé voir deux fois le Tour de France au Tourmalet !” raconte Jean-Marc à Claude et Gérard, intarissables sur le sujet. Puis ils s’assoient de nouveau avec les collégiens, nombreux à lever la main pour témoigner de ce moment partagé. “On a même appris comment réparer un vélo !” lance Juliette avant que Jean-Marc résume : “c’est un sport sympathique, qui rassemble les gens”, comme ce matin.