Ce récit est le premier d’une série d’articles qui racontent la carte blanche donnée à Capucine Dufour pour créer une randonnée artistique et dansée entre La Garenne Lemot – Grand Patrimoine de Loire-Atlantique et le centre-bourg de Boussay.
Explorer de nouveaux sentiers, questionner nos reliefs, les parcourir autrement. Invitée à imaginer une randonnée sensible entre Gétigné et Boussay, la chorégraphe et paysagiste Capucine Dufour ouvre la voie d’une nouvelle saison de création.
Le paysage qu’elle arpente aujourd’hui, Capucine Dufour le découvre. Chaussée de ses baskets et une carte en main, la paysagiste-chorégraphe s’engouffre dans les sous-bois en contrebas de Boussay, à la frontière entre Loire-Atlantique et Vendée. Ici, pas de vignoble mais des forêts alluviales qui bordent le Rousselin, hameau où jadis on faisait rouir le lin, et qui dévoilent au fil de ses pas des coins secrets propices aux baignades dans la Sèvre nantaise.
C’est peut-être là ou pas très loin qu’en juin prochain, elle emmènera les curieux se balader pendant une randonnée sensible reliant Gétigné à Boussay. Les points de départ et d’arrivée sont tracés, le reste est à dessiner, à inventer.
Alors Capucine reviendra, seule puis accompagnée, se balader, questionner, échanger avec les habitants aussi. Elle a déjà discuté avec des membres du Pays d’art et d’histoire au Pallet, évoqué une prairie sauvage où pourrait s’imaginer des pauses artistiques, parlé de tissage.
Quand elle ne sera pas sur le chemin, elle étalera peut-être aussi sur le sol de grandes cartes, superposera les calques, étudiera les couches géologiques pour sonder autrement ces reliefs, les apprivoiser à sa manière. Avec son bagage de paysagiste, Capucine aime chercher, explorer, dessiner, tracer pour nous amener à rencontrer autrement le paysage. En sortant des sentiers ? En traversant les herbes hautes ? En fermant les yeux ? En le dansant ? Pourquoi pas.
Mais aujourd’hui, l’heure est à l’exploration, à l’arpentage, aux sensations.
Au bord de la rivière, des rochers arrondis lui évoquent le Japon. Quelques pas plus loin, le pont métallique et les maisons qui le bordent lui rappellent des vallées industrielles du nord de l’Espagne. Et partout une sensation de romantisme que le soleil renforce en traçant les ombres des arbres dans la rivière.
Chemin faisant, elle cite La pensée paysagère d’Augustin Berque qui parle de maisons d’éleveurs orientées vers les troupeaux et de la seule qui a choisi de leur tourner le dos. Elle s’intéresse aux histoires que raconte le paysage, à ce qu’il dit de nous. Le réel, les envies, les idées, les contraintes : tout s’entrechoque doucement et semble déjà faire sens.
Capucine ne connaît pas ce coin, mais elle est familière des forêts où elle aime amener les gens à crapahuter. Une fois, on a paumé une danseuse dans la forêt à la nuit tombée. Alors, elle n’hésite pas à s’écarter du chemin, de l’évidence pour grimper et changer de point de vue. Après la Gaignardière, nous replongeons au pied d’un grand et élégant pont de pierre, à deux pas d’une cheminée élancée que l’on continuera à apercevoir de l’autre versant. Un demi-tour, un doigt sur la carte et la forêt laisse place aux hameaux, la terre au bitume.
Nous traversons La Chevalerie et ses longs ateliers, ses vieilles maisons aux toits de briques bordées d’hortensias et grimpées de lierre. Un point de vue lointain sur l’église de Boussay qui se détache seule du paysage vallonnée et nous retrouvons les sous-bois après avoir traversé la Ténévrie et ses autels de bric et de broc, ses petits édifices où se mêlent le naturel et la tôle, la rouille, la ruine.
Quelques mûres grillées, des frémissements de vipère et de lézards, des bonds de grenouilles et nous rejoignons notre point de départ.
C’est aussi celui du projet de Capucine Dufour.