Salle commune

Récit d’un atelier collectif de Bibliothèque Vivante

Récit d’un atelier collectif imaginé par Élise Jaunet et Katy Ménard-Pageau dans le cadre du projet Bibliothèque vivante.

Six voix singulières et un espace partagé pour s’échauffer, se raconter, s’écouter. À trois jours de dévoiler leurs histoires, les participantes et participants de cette Bibliothèque Vivante croisent leurs récits et trouvent leurs appuis.

Katy, Elise et Sacha entrent dans la salle des Camélias, espace communal aux teintes grises et beiges, des murs jusqu’au mobilier. C’est ici que, dans quelques minutes, elles accueilleront les six participantes et participants de cette Bibliothèque vivante, pour un temps collectif, à trois jours de Topo(s).

Rapidement, elles déplacent les tables, empilent les dizaines de chaises le long des murs, leurs pieds ornés de balles de tennis pour étouffer le bruit.

Laure, Jacques, Arkady, Knarik, Maria et Platon arrivent tour à tour et forment un cercle. Katy ouvre la séance avec un échauffement, pieds bien ancrés, reliés au sol. Inspirations, expirations sur les notes de Caledonian Canal de Yann Tiersen. Quelques gestes pour réveiller le corps : on tapote, on époussette. Puis un instant de pause centré sur le souffle. Le groupe se passe un son, avec la voix, les gestes et le regard, toujours adressé.

Ziiii !
Ba !
You !

« Elle est bien isolée, la salle ? », plaisante Platon, s’inquiétant de ce que les voisins pourraient imaginer.

Elise prend le relais, précise les contours de la Bibliothèque vivante : le format, le temps d’échange, l’écoute, et la manière de garder la main sur son récit face à un interlocuteur trop bavard. Elle glisse aussi quelques conseils : « Ce n’est pas grave si vous ne racontez pas exactement la même chose à chaque fois. » « Et si vous ne vous sentez pas bien, pas à l’aise, vous pouvez interrompre votre histoire à tout moment. »

Katy rappelle quelques gestes qu’elles pourront adresser aux participants le jour J : le pouce levé pour indiquer de parler plus fort, la main grande ouverte pour signaler qu’il reste cinq minutes. Chacun et chacune se met alors en situation. Trois récits démarrent, les autres deviennent auditeurs.

Un récit choral émerge peu à peu. Deux voix de femmes, celle d’un jeune garçon. « Je dormais dans un lit superposé avec ma sœur », « pour notre sécurité, nous n’avions pas d’autre choix que de partir », « on parlait vietnamien à notre mère, elle nous répondait en français… ou l’inverse. »

Erell et Jacques échangent un sourire avec Platon, qui leur lance : « Maintenant, je vais vous raconter comment était la neige en Russie », photos à l’appui. Laure, elle, reste les yeux plongés dans ceux de Knarik quand l’Arménienne, titulaire d’une carte de séjour, lui confie doucement que  « maintenant, ça va aller. »

À distance, Katy, Elise et Sacha observent, échangent. Puis Katy s’approche du groupe, indique avec ses doigts qu’il reste cinq minutes avant de faire retentir le son cristallin du triangle.

Les rôles tournent, se mélangent. Laure prend place dans un triangle intime de chaises serrées, face à Erell et Maria. Elle sort de son panier en osier de petites figurines et se lance : « Je m’appelle Laure, je suis née en Belgique, le pays de Tintin et Milou. » Un peu plus loin, comme une réponse, Jacques s’adresse à Platon en évoquant la Provence où il a vu le jour, tandis qu’Arkady explique à Knarik pourquoi il a quitté la Russie pour la France.

Les minutes filent au rythme des récits, des rires, des histoires. Comme un écho aux souvenirs enneigés de Platon, Jacques raconte qu’il a gravi huit fois le Mont Blanc et qu’il a même eu la chance de partir en expédition dans l’Himalaya. Une passerelle se dévoile entre des histoires venues de partout, qui attendaient simplement d’être racontées.